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LU Hang, Peintre rebelle

-- Yves Kobry (Critique d’art, membre de l’AICA)

 

  en 1987 d’un père étudié à l’Académie centrale des beaux-arts, et d’une mère historienne de l’art, Lu Hang a donc baigné dès son plus jeune âge dans le milieu artistique. Il a décidé de suivre les traces de ses parents en s’inscrivant à l’école des arts décoratifs de Pékin avant d’aller étudier aux Beaux Arts de Sichuan. Après son arrivée en France en en 2013 il alla parfaire sa formation à l’école des Beaux Arts de Bourges. Il s’agit donc un jeune peintre qui commence sa carrière avec un bagage artistique et un savoir faire, chose très rare pour un artiste de sa génération. Voilà à la fois un avantage et un handicap car il va devoir se dégager des références et de la virtuosité acquise pour trouver sa propre voie.

 

Au départ il est influencé par le pop art, en particulier par Robert Rauschenberg, empruntant ses thèmes à la mythologie et à l’imagerie socialiste, tel Lénine haranguant la foule ou Khrouchtchev dans un champ de blé ou encore des jeunes pionniers au garde-à-vous ou un défilé militaire, dans un style graphique aux couleurs acidulées, jouant du contraste entre le réalisme des visages ou des postures et le flou, l’effacement, les coulures et les superpositions. Dès le début on trouve chez Lu Hang cette volonté de détournement du sujet, cette révolte ironique contre l’idéologie, la discipline et l’image de propagande.

 

Petit à petit, il va se détacher du réalisme de la pop culture pour adopter un style néo-expressionniste dans le sillage de Georg Baselitz et de Markus Luperz. Si le peintre conserve le goût des grands formats et des couleurs violentes et heurtées, le motif est simplifié, épuré, la forme devient plus synthétique, plus abstraite, plus rugueuse. Elle intervient sur un vaste plan coloré, parfois presque monochrome, telle cette tête humaine, à peine identifiable, qui surnage sur un large fleuve rouge. Le personnage est isolé, parfois tronqué, perçu en vision rapprochée, souvent en présence d’un animal, tels ces porcs destinés à l’abattoir ou ce lapin au laboratoire. Le chien, thème récurrent chez l’artiste vaut comme symbole de la domestication et du dressage auquel l’être humain est lui aussi soumis.

 

Chacun de ses tableaux a une valeur symbolique mais la narration n’est plus descriptive et anecdotique mais allusive. Elle laisse au spectateur le soin de deviner ou plutôt d’interpréter librement le sens de l’œuvre. Il ne s’agit plus de détourner par l’ironie une image de propagande mais de stimuler la réflexion, l’imaginaire.

 

Si le travail de Lu Hang comporte une dénonciation et une critique des contraintes exercées dans certaine communauté, le message n’est pas strictement politique mais a une portée universelle et utopique. L’espérance d’un monde et d’une société entièrement libre où toute forme d’asservissement que ce soit par l’idéologie, la religion, le travail ou la discipline aurait disparu, où l’homme pourrait s’épanouir par sa créativité, forger librement sa personnalité et mener sa vie sans entrave.

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Yves Kobry 

 

Historien d’art, critique d’art, et commissaire d’expositions indépendant.

 

Membre de l’AICA depuis 1988, Yves Kobry a été le commissaire de plusieurs expositions, dont l'exposition « Vienne début d’un siècle » au centre Pompidou en 1986 auprès de Jean Clair, et des expositions Pascin en 2006 et « Le constructivisme russe. Vers de nouveaux rivages » en 2008 au musée Maillol. Il a collaboré au Musée d’art moderne de la ville de Paris aux expositions « Années 30, le temps menaçant » en 1996 et Bonnard en 2006.

 

Il a également collaboré aux revues Beaux Arts Magazine, l’Oeil, Connaissance des Arts, Les Lettres Françaises.Et il a rédigé de nombreuses préfaces pour des catalogues d’exposition.

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